( J'ai déserté les réseaux )
Je m'en souviens encore.
Y'avait une odeur de renaissance, dès le réveil.
Qui m'avait visité dans la nuit pour me souffler toutes ces pensées ?
C'était une belle journée d'été, sous un soleil radieux.
Aller voir les copains dans leur vallée.
Préparer son sac pour partir vers de nouvelles aventures.
Essuyer une heure et demie de route.
Toujours mon sac de voyage vert sur le dos depuis 2015, rempli comme à son habitude de vêtements en boules, de quelques vivres, de quelques livres, de quoi écrire et d'autres.
Démarrer le moteur, rester l’œil attentif dans le rétroviseur.
Entendre le moteur perdre sa cadence dans les montées, repartir de plus belle dans les descentes, succession de lieux-dits, de virages, de panneaux de signalisations.
Après avoir passé Aubusson, je sentais se lever en moi un vent nouveau.
J'ai parlé à l'invisible ou est-il venu me rencontrer ?
J'avais comme la présence chimérique d'un guide sur mon épaule.
Il m'a parlé de toi alors je lui ai demandé notre rencontre, il s'est tût et à rit.
Il m'a demandé ce que je faisais là et s'est tût.
Ce que je ne savais pas c'est que les plans de l'univers et ses synchronicités étaient déjà en place.
( Ça faisait un an que je la voyais passer sur les réseaux.
Un an que des algorithmes me proposait de l'ajouter.
Un an qu'elle était là, déjà dans mon horizon sans que je ne m'en aperçoive vraiment. )
Quelques kilomètres avant mon arrivée, j'ai commencé à ressentir une vibration dans mon corps. Mon esprit flottait à la fois en dedans et en dehors.
Et non je n'étais pas sous quelconque substance qui aurait pu modifier ma perception.
( Il arrive à beaucoup d'entendre des bruits et le commun du mortel tend à penser que c'est le fruit de l'imaginaire, que l'oreille fait des farces, mais non.
Ce n'est pas parce qu’on ignore l'origine d'un phénomène qu'il ne se produit pas, qu'il n'a pas de racine, qu'il n'existe pas.
Face à l'inconnu, on parle d'hallucination, de diableries, de divin, comme pour fuir ce qui nous est étranger, ou alors les cloisonner dans des termes abstraits car il nous refuse d'admettre la possible existence des invisibles . )
Seraient-ce les lois de l'attraction ?
Je n'ai jamais été autant sûr, aujourd'hui, d'être sur le chemin que je devais emprunter.
Je ne pense pas avoir eu vraiment le choix.
De la mythomanie sous alcool qui s'ignore, éclatant à coup de poing la porte de ma chambre jusqu'aux tentatives d'attenter à mes jours.
J’accueille à bras ouverts cette idée que nous sommes déjà déterminés d'avance.
J’accueille à bras ouverts cette idée que nous pouvons toujours nous déterminer.
J’accueille à bras ouverts cette idée que tout est possible et qu'il suffit parfois de sentir la brèche pour s'y engouffrer, bien qu'il arrive que la vie nous y pousse sans accord ou nous incite à rentrer.
Personne n'est en haut quand j'arrive. Je me gare à côté de chez E et C, les initiateurs de ce weekend camping/soirées et feux de bois.
Shaka, attaché, me regarde passer nonchalant dans sa niche métallique, semble sortir d'un ennui profond et se met à aboyer, annonçant mon arrivée.
J'imagine qu'en contre-bas, dans cette vallée féerique ils ont eu l'écho de mon moteur de plus.
Je me gare dans le cercle où la jument et l'ânesse demeurent parfois quand il faut entretenir leurs sabots, à côté de la bécane de E, toujours poussière et sale.
J'enlève mon casque, mes gants, fais le tri de mes affaires, histoire d'être sûr de ne pas remonter dans peu de temps, car la pente pour accéder à ce paradis terrestre est assez raide.
Je passe sur le chemin, devant Shaka, lui envoie quelques mots doux, l'appelant " mon gros ", lui demandant comment il va, il me répondit avec un sourire de chien, langue pendue par la chaleur écrasante.
J'observe les arbres sans tous les connaître.
Mes yeux se perdent dans les branchages et de là où mon regard se pose, je vois un oiseau s'envoler, multicolore, et un autre, du même gabarit le suivre de près.
Ils semblent danser dans l'air, l'un vers l'autre, lâchant quelques mélodies joyeuses.
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